Théologie du sacrifice et de la réversibilité chez Joseph de Maistre : un naturalisme mystique

 

            


        Contemporain et témoin de la Révolution française, c’est de celle-ci, en réaction contre celle-ci que Joseph de Maistre a pu, depuis son duché de Savoie, fonder l’essentiel de sa doctrine, de son œuvre. Face aux effusions de sang, face à la déflagration de violence inouïe et cosmique de cette « révolte insensée et sacrilège, commise contre tout ce qu’il y a de plus saint dans l’univers, couronnée par un énorme parricide, et qui a couvert l’Europe de larmes et de sang[1] », l’urgence était pour Maistre de donner un sens à cet eschatologique écroulement historique.  Forgeant une véritable lecture mystique de cet événement – lecture mystique mais aussi anthropologique, la spéculation métaphysique et positive étant chez lui consubstantielles –, Maistre développe ainsi une théorie, une théologie du sacrifice intrinsèquement liée au concept de réversibilité, concept fondamental de la pensée maistrienne, qui traverse et systématise d’une certaine manière toute l’œuvre du penseur savoyard, étant, selon Bernard de Vaulx, l’« idée maîtresse de sa métaphysique qu’on retrouve déjà dans les Considérations et qui a pris tout son développement dans les Soirées[2] », et qui sera développée, explicitement, dans le court essai Éclaircissement sur les Sacrifices.

 

            Comme le remarque Barbey d’Aurevilly, « La sagacité de Joseph de Maistre tient plus à son point de vue qu’a sa vue même. Or, son point de vue, c’est la révélation historique, la tradition[3] ». Cette remarque est capitale en ce qu’elle caractérise les spécificités mêmes de la pensée maistrienne, le point de vue d’où cette pensée se place : la Tradition. Cette notion, qui sera ultimement conceptualisée par René Guénon[4] un siècle après comme étant « le dépôt éternel de la doctrine et de la Connaissance[5] », la transmission divine de l’ensemble de « tout ce qui relève des vérités principielles ou de principes immuables découlant de la Vérité première et unique[6] », consiste en effet à considérer l’ensemble des formes religieuses et culturelles universelles comme régies par un même principe transcendant car « ces formes sont toujours et invariablement porteuses (...) de ce rattachement à une source  "non-humaine" qui témoigne de leur authenticité[7] ». La Tradition est, en d’autres termes, ce que l’on peut concevoir comme étant la vérité intrinsèque de la religion universelle. Ce que Maistre résume en affirmant, dans Les Soirées de Saint-Pétersbourg, que « [l]es traditions antiques sont toutes vraies[8] ».

 

            Tentant ainsi de comprendre les origines du principe sacrificiel, de cerner « [l]a racine d’une croyance aussi extraordinaire et aussi générale [qui] doit être bien profonde[9] », c’est par le prisme de ce que Barbey appelle la « révélation historique », que Maistre aborde, en ouverture de son Éclaircissement, la question des sacrifices : 

 

Il nous faut (...) avouer (...) que l’histoire nous montre l’homme persuadé dans tous les temps de cette effrayante vérité : qu’il vivait sous la main d’une puissance irritée, et que cette puissance ne pouvait être apaisée que par des sacrifices.[10]

 

            En outre, dans une optique ethnographique comparatiste, il investit les cultures égyptienne, hindoue, grecque antique ou encore précolombienne et en relève le systématisme du principe sacrificiel, son caractère fondateur et universel. Surtout, il tâche de mettre au jour la fonction communautaire des rites sacrificiels, à rebours de la philosophie positive des Lumières qui n’y voit que superstition et qu’archaïsme dépassé, et il « prétend y observer in situ des mécanismes sociaux qui persistent dans les civilisations les plus récentes[11] ». D’ailleurs, dans Les Soirées, Maistre avait déjà esquissé ce qui sera plus tard, toutes proportions gardées, le cœur de la théorie girardienne, le « meurtre fondateur », et ce en cernant la fonction sociale nécessaire et primordiale du bourreau, véritable « pierre angulaire de la société[12] » en ce qu’il est le « lien de l’association humaine[13] » : « Ôtez du monde cet agent incompréhensible ; dans l’instant même l’ordre fait place au chaos, les trônes s’abîment et la société disparait.[14] »

            Investissant ainsi le champ socio-anthropologique, Maistre s’inscrit ainsi dans ce que l’on considérera plus tard être l’« âge théologique de la sociologie[15] ». Aussi, comme le remarque Pierre Glaudes,

 

[le] principal apport [de Maistre] est de déplacer la réflexion théologique sur un terrain qui sera investi, au cours du xixe siècle, par les sciences de la société : tout en affirmant son identité chrétienne, il est le premier à mettre en évidence la fonction sociale du sacrifice dans une théorie d’ensemble élaborée à partir d’une étude comparative des pratiques religieuses à travers les époques et les civilisations.[16]

 

            Et en effet, la pensée maistrienne, mystique et surnaturaliste par essence, ne prétend pas mener une simple étude comparatiste, ses postulations ne sont pas d’ordre matérialiste mais métaphysique. Et, selon la correspondance surnaturaliste (nature-surnature, forme-esprit), Maistre de proposer une méta-anthropologie, une anthropologie chrétienne à l’éclairage de la Révélation et du dogme catholique.

 

            En outre, c’est cette postulation initiale de la Révélation judéo-chrétienne à toute réflexion qui distingue Maistre d’un traditionalisme « synthétique ». Comme le souligne Jean-Yves Pranchère :

 

Maistre ne pense pas que la tradition, comprise à la façon de Bonald comme la continuation d’une « Révélation primitive », soit la source ultime et unique de la vérité. Du Pape et Les Soirées rapportent les traditions du genre humain, non à la perpétuation d’une Révélation positive opérée par Dieu, mais à l’universalité d’un "sentiment inné" inscrit dans la nature même de l’homme.[17]

 

            Maistre défend en effet le principe innéiste. Pour lui, chaque homme possède en lui-même, citant Origène, « des notions de morale communes et innées écrites en lettres divines[18] ». Cependant, contrairement à la notion de « Révélation primitive », cet innéisme ne va pas chez Maistre sans concevoir la « dégradation primitive[19] » de la nature humaine. Dans ce sens, la nature humaine étant ainsi dégradée, dans sa chair et dans son esprit, ces idées innées, si elles recouvrent en leur principe la Vérité, n’en restent pas moins altérées, cette altération se retrouvant dans les formes religieuses et culturelles ainsi modélisées par ce principe innéiste. C’est ainsi qu’à l’inverse de toute tentation « synthétique », la pensée traditionnaliste maistrienne est pleinement intégraliste. Seule la Révélation judéo-chrétienne, progressive, et toujours continuée par la Tradition ecclésiale, peut restaurer la pleine Vérité que ces idées innées portent, bien qu’altérées, en germe. Dès lors, les dogmes de l’Église, corps du Christ, Verbe incarné de Dieu, et donc ultime dépositaire de la Révélation de laquelle est garant le pape par le principe d’infaillibilité[20], ne sont que la restauration des dogmes naturels, naturellement corrompus. Pour Maistre, en effet, il n’y a « pas de dogme chrétien qui ne [soit] appuyé sur quelque tradition universelle et aussi ancienne que l’homme, ou sur quelque sentiment inné qui nous appartient comme notre propre existence[21] ».

 

 

            Ainsi, à la lumière de la Révélation, Maistre entreprend de proposer une théologie sacrificielle. S’ « il n’y a pas un dogme chrétien qui n’ait sa racine dans la nature intime de l’homme[22] », à l’inverse, par analogie, il n’y a aucun dogme naturel qui ne peut être légitimé (et rectifié) par la Révélation. Par là, donc, le principe sacrificiel est en soit nécessaire de fait, même si la raison ne l’ « indique nullement » et que le « sentiment » la « repousse[23] ». Afin de comprendre la nécessité du principe sacrificiel, qui, bien qu’altéré, relève du dogme naturel, Maistre, « ce penseur original, qui expliquait tout par l’origine, le péché originel suffisait[24] », mobilise et postule ainsi sa théologie fondamentale de la Chute.

 

            Selon Maistre, le péché originel a entraîné, sur le plan cosmique, plus qu’une radicale séparation entre le monde naturel et le monde de la Grâce, mais une véritable contamination de la matière, sa corruption profonde comme matérialisation de la matière. C’est, selon son propre néologisme, la « réité ». L’homme, relevant par son corps du monde naturel, il subit lui aussi un véritable « schisme de l’être[25] », souffrant dès lors dans son être même d’« oppositions simultanées[26] ». Essence de la corruption de l’homme, ce principe maléfique, que Maistre conçoit, en s’inspirant d’Origène, comme « âme de la chair » réside dans le sang, dans la « vitalité du sang[27] », principe vital de l’homme. Si c’est donc dans le sang que réside cette « âme de la chair » maléfique, principe de corruption morale et conséquence de la corruption naturelle, le sacrifice est donc nécessaire en ce qu’il purge le principe du mal qui est en nous. L’homme étant « coupable par son principe vital, par sa chair, par sa vie[28] », « le ciel irrité contre la chair et le sang, ne [peut] être apaisé que par le sang[29] » . C’est pourquoi Maistre remarque, dans sa perspective comparatiste, que les sacrifices sont essentiellement caractérisés par leur caractère sanglant, leurs effusions de sang :

 

Il ne s’agit point en effet uniquement de présent, d’offrandes, de prémices, en un mot, d’un acte simple d’hommage et de reconnaissance, rendu, s’il est permis de s’exprimer ainsi, à la suzeraineté divine (…).

Il s’agit de sang, il s’agit de l’immolation proprement dite ; il s’agit d’expliquer comment les hommes de tous les temps et de tous les lieux avaient pu s’accorder à croire qu’il y avait, non pas dans l’offrande des chairs (il faut bien observer ceci), mais dans l’effusion du sang, une vertu expiatrice utile à l’homme.[30]

 

            Le principe sacrificiel est ainsi intrinsèquement lié au dogme de l’Expiation. Maistre fait en effet une « interprétation juridique » du principe sacrificiel, qui « met l’accent sur une "culpabilité de caractère personnel" passible de mort[31] ». C’est pourquoi, le sacrifice ayant avant tout une dimension socio-communautaire, Maistre, dans son optique surnaturaliste, le conçoit avant tout comme un acte judiciaire, le sacrifice étant ainsi originellement lié à la peine de mort. Considérant la communauté « comme un être moral et unique, ayant ses bonnes ou ses mauvaises qualités, capables de mériter ou de démériter », celles-ci sont « susceptibles par conséquent de peines et de récompenses[32] ». Ainsi, si le sacrifice est pour lui le « principe fondamental de l’autorité[33] », il exige que les sacrifiés soient « des coupables condamnés par les lois[34] ». C’est justement par cet acte de justice, et de par les liens sociaux qui unissent les hommes entre eux, la communauté étant considérée organiquement comme une seule et même entité, un seul et même corps, que peut s’opérer, par phénomène mystique de réversibilité, la réparation des crimes commis par le sacrifié-condamné. En purgeant sa communauté de l’élément coupable, la communauté, unie par ce sacrifice, se purifie. En effet, comme le résume Pierre Glaudes, en

 

[é]tant livré à la vindicte divine par ses crimes, un criminel s’en délivre par son sang, et la communauté tout entière, qui serait elle-même criminelle en le laissant vivre, est lavée de toute souillure en l’exécutant.[35]

 

            Le sacrifice, acte judiciaire, a donc une double implication. C’est cette double implication que l’on retrouve d’ailleurs formulée très pertinemment chez Baudelaire, dont on connait l’influence de la pensée de Maistre. La formule résume tout : « La peine de Mort n’a pas pour but de sauver la société, matériellement du moins. Elle a pour but de sauver (spirituellement) la société et le coupable.[36] » L’implication communautaire ne va pas en effet sans une implication personnelle. Par la loi de réversibilité, si le condamné sauve et purifie spirituellement sa communauté, il sauve et purifie corrélativement son propre être en acceptant la punition de son crime. En d’autres termes, en purgeant organiquement son principe vital par l’effusion salvateur de son sang, il expie pleinement la peine qui résulte de sa faute.

 

            Le « dogme de la réversibilité[37] » est ainsi fondamentalement un principe de « transitivité des mérites liés à la peine[38] », reposant, dans le cas de la peine capitale, sur une « saine réciprocité entre la transgression et la punition[39] ». Surtout, par ce principe de réversibilité, le sacrifice est en soi « le cœur du sacré, car le sacrifice est l’usage où s’opère obscurément la conversion du mal en bien[40] ». En effet, c’est de cette « interdépendance paradoxale de la violence et du salut[41] » que réside l’ambivalence du sacré, ce que Maistre relève à travers l’étymologie du mot « sacré » même :

 

Les anciens croyaient que tout crime capital commis dans l’état liait la nation, et que le coupable était sacré ou voué aux dieux, jusqu’à ce que, par l’effusion de son sang, il eût dé-lié et lui-même et la nation.

On voit ici pourquoi le mot sacré (sacer) était pris dans la langue latine en bonne et mauvaise part, pourquoi le même mot dans la langue grecque (ΌΣΙΟΣ) signifie également ce qui est saint et ce qui est profane ; pourquoi le mot anathème signifiait de même tout à la fois ce qui est offert à Dieu à titre de don, et ce qui est livré à sa vengeance ; pourquoi enfin on dit en grec comme en latin qu’un homme ou une chose ont été dé-sacrés (expiés), pour exprimer qu’on les a lavés d’une souillure qu’ils avaient contractée. Ce mot de dé-sacrer (άφοσιοῡν, expiare) semble contraire à l’analogie : l’oreille non instruite demanderait ré-sacrer ou ré-sanctifier ; mais l’erreur n’est qu’apparente, et l’expression est très exacte. Sacré signifie, dans les langues anciennes, ce qui est livré à la Divinité, n’importe à quel titre, et qui se trouve ainsi lié ; de manière que le supplice dé-sacre, ex-pie, ou dé-lie, tout comme l’ab-solution religieuse.[42]

 

            Cependant, c’est par abus de cette loi de réversibilité, dans son principe de « transitivité » reposant sur un phénomène mystique de substitution (le sang du coupable payant pour la communauté entière), que le sacrifice initialement judiciaire devint, pour Maistre, inique. Ce qui est un rite universel juste, s’est vu être corrompu au fil de l’évolution humaine :

 

La doctrine de la subtitution étant universellement reçue, il ne restait plus de doute sur l’efficacité des sacrifices proportionnée à l’importance des victimes ; et cette double croyance, juste dans ses racines, mais corrompue par cette force qui avait tout corrompu, enfanta de toute part l’horrible superstition des sacrifices humains.[43]

 

            Bien que cela soit fondamentalement injuste, « en vain la douce humanité et la compassion naturelle prêtaient une nouvelle force aux arguments de la raison : devant ce dogme entraînant la raison demeurait  aussi impuissante que le sentiment[44] ». En effet, tout innocent peut lui-même être substitué au coupable car, possédant essentiellement la faute originelle en lui, s’il n’est lui-même coupable en situation, il l’est par nature, par son sang coupable. Tout sang peut donc payer pour tout sang.

 

            C’est là, dans la théorie maistrienne (et qui fait la distinguer d’un traditionalisme « synthétique » radical), que le sacrifice christique intervient comme ultime révélation dogmatique. En effet, pour Maistre, « seule la christologie, la Rédemption opérée par Jésus, est la signification réelle et définitive de ladite réversibilité[45] ».

            Le Sacrifice du Christ, offre effectivement tout d’abord aux hommes « le sang dont il[s] avai[ent] besoin[46] ». Dieu fait homme, par et au-dessus toute humanité, de par le « prix infini[47] » de son être, le Christ, l’Agnus Dei, par miséricorde infinie, prend en effet sur lui les péchés de l’humanité entière et, par son sang versé, expie donc, au nom de l’humanité entière et par un universel effet de réversibilité, les péchés de cette humanité. Il rachète – mais n’annihile pas ses conséquences – le péché originel. Il est, par son sacrifice librement offert[48], le Nouvel Adam[49]. Par son Fils, Dieu « a voulu (...) réconcilier tout avec lui-même (...), en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix[50] ». Cependant, puisque le sacrifice du Christ n’annihile pas les conséquences de la Chute, l’homme n’en reste pas moins toujours pécheur, et, comme le dit Maistre, en péchant reproduit le péché originel « à chaque instant de la durée, quoique d’une manière secondaire[51] » ; le sacrifice du Christ doit dès lors être reproduit lui aussi « à chaque instant de la durée »[52]. C’est pour cela que le Christ lui-même a initié ses disciples, lors de la Cène, au rite mémoriel de sa Passion reposant sur le principe de communion au pain, son Corps, et au vin son Sang, les espèces desquels, bien qu’inchangées en tant qu’accidents, devenant, par transsubstantiation, véritablement, en substance, son corps et son sang. Plus que des signes, les Saintes-Espèces sont en effet les « présences corporelles [du Christ] en tels lieux de notre espace[53] ». Le rite eucharistique est ainsi la reproduction sacramentale non sanglante du même et unique sacrifice du Christ, ainsi « perpétuellement immolée[54] ».

            Aussi – et surtout –, nous dit Maistre, le sacrifice ultime du Christ a permis aux hommes de pleinement comprendre la véritable valeur de « la rédemption par le sang[55]». En réalité, loin d’abolir ce dogme, « le christianisme est venu [le] consacrer[56] ». Si le Christ prend ultimement sur lui le nécessaire principe sacrificiel, il nous invite aussi à le suivre par le « coté douloureux[57] », invitant ses disciples à accepter de souffrir, quand bien même ils seraient innocents de fait, de se joindre, au nom de l’humanité entière, à ses propres souffrances, à son éternelle immolation et d’accepter « ce paradoxe mystique[58] » à savoir de, par son sacrifice librement consenti, « pouvoir restituer ce qu’[on]n’a pas volé[59] ». Cela, d’ailleurs, est légitimé mystiquement par le rite eucharistique lui-même. L’Église nous enseigne en effet que le phénomène surnaturel de transsubstantiation est opéré par les paroles de consécration du prêtre lors du rite eucharistique, lesquelles paroles étant en réalité les paroles du Christ lui-même, telles que prononcées par le Christ lors de la Cène : « [c]’est donc la parole du Christ qui produit ce sacrement[60] ». Le prêtre agissant dès lors in persona Christi, il s’associe lui-même à la reproduction sacramentelle du sacrifice du Christ. Surtout, l’Église étant le corps même du Christ, c’est l’Église entière qui s’associe elle-même extérieurement et mystiquement à ce sacrifice, comme, intérieurement et relativement, les fidèles s’associent à ce sacrifice en s’offrant eux-mêmes[61]. En outre, par la manducation du corps sacramenté, « par assimilation, le vivant chang[eant] en soi ce qu’il consomme[62] », le fidèle devient mystiquement le Christ lui-même, renouvelle son adhésion à son Corps mystique (Corpus mysticum), l’Église. Maistre de conclure ainsi que, entre le sacrifice du Christ ou de ses imitateurs martyrs, « [l]es deux rédemptions ne diffèrent (...) point en nature, mais seulement en excellence et en résultats, suivant le mérite et la puissance des agents.[63] »

 

            Nous voyons donc que, pour Maistre, imprégné de la théologie la plus canonique, le Christ, loin d’abolir le principe sacrificiel, le consacre en réalité – consacrant par là la loi de la réversibilité. Tout en rétablissant la vérité du dogme, en le révélant pleinement, la Croix du Christ serait l’affirmation manifestée d’ « une des plus grandes et des plus importantes vérités de l’ordre spirituel[64] », à savoir qu’il y a « dans l’effusion de sang, une vertu expiatrice utile à l’homme[65] ». Ainsi donc, bien que le Christ soit cependant venu réformer ce dogme naturel en y introduisant la notion de libre arbitre (le fidèle est appelé à se joindre librement au sacrifice de la Croix), et qu’on ait pu voir là des « implications généreuses[66] », l’innocent acceptant de souffrir à la place du coupable, l’efficacité sacrificielle, par la loi de réversibilité, et sa nécessité n’en sont pas moins affirmées en tant que telles. Ce que résume Pierre Glaudes :

 

En refusant d’abolir tout sacrifice par la Passion du Christ, elle [la théorie maistrienne de la réversibilité] déploie une mystique de la souffrance où la mort du Fils de Dieu n’est plus que l’illustration d’une loi de l’univers. Pour Maistre, en effet, la Rédemption est un cas particulier de la loi du sang qui gouverne le monde. Par la volonté de son Père, Jésus crucifié n’abolit pas les pratiques sacrificielles, il les élargit au contraire aux dimensions d’un rite cosmique (…). Le sacrifice, au sens chrétien du terme, n’est alors que l’atténuation d’un mode de relation propre aux êtres vivants, que l’écrivain pose en termes de violence et de destruction mutuelle.[67]

 

            Ainsi, si la théologie du sacrifice de Maistre laisse entrevoir des « accents inquiétants[68] », c’est essentiellement du fait que derrière sa théorie du sacrifice, sa mystique de la réversibilité révèle une tentation naturaliste. Bâtie sur des postulations philosophiques inspirées de la théologie origénienne (le principe vital comme foyer organique du mal, et la tentation néoplatonicienne de considérer la matière comme maléfique, comme contaminée substantiellement par le mal), la théorie de la réversibilité de Maistre n’est en effet pas sans rappeler à bien des égards[69] celle, cruciale dans la pensée d’Origène justement, de l’apocatastase – théorie, d’ailleurs condamnée par l’Église lors du Concile de Constantinople en 543, qui postule la reconversion de toutes choses créées, spirituelles comme matérielles, jusqu’au diable lui-même, dans le Principe divin originel ainsi qu’une régénération cosmique. C’est cette influence que l’on retrouve ainsi explicitement exprimée par Maistre lui-même dans Les Soirées :

 

Le christianisme nous montre bien une autre balance. D'un côté tous les crimes, de l’autre toutes les satisfactions ; de ce côté les bonnes œuvres de tous les hommes, le sang des martyrs, les sacrifices et les larmes de l'innocence s'accumulant sans relâche pour faire équilibre au mal qui, depuis l'origine des choses, verse dans l'autre bassin ses flots empoisonnés. Il faut qu'à la fin le côté du salut l'emporte, et pour accélérer cette œuvre universelle, dont l'attente fait gémir tous les êtres, il suffit que l'homme veuille. Non seulement il jouit de ses propres mérites, mais les satisfactions étrangères lui sont imputées par la justice éternelle, pourvu qu’il l'ait voulu et qu'il se soit rendu digne de cette réversibilité.[70]

 

            On ne peut donc que relever « [l]a nature paradoxale de la réversibilité[71] » – paradoxe en ce que la théorie de la réversibilité maistrienne repose sur la croyance mystique en l’épuisement du mal par lui-même, le mal devenant « l’instrument du bien entre les mains de Dieu[72] ». Plus que cela encore, le mal ainsi nécessaire pour concourir au bien, le bien ne serait que la conversion, par le sacrifice, du mal ; le mal ne serait plus l’absence du bien, mais ce serait le bien qui serait une absence de mal. Ce qui est impossible : Dieu, on l’a dit à la lumière du dogme catholique, n’est pas responsable du mal. Si Dieu tolère le mal, parce qu’il ne peut ni ne veut altérer la liberté de l’homme qui a, lui-même, librement introduit le mal dans le monde, et parce qu’il le conçoit comme une épreuve humaine dans la perspective de l’économie du salut, il ne peut toutefois en aucun cas le vouloir, au risque de n’être plus ontologiquement Dieu, car Dieu ne peut qu’être le Principe du bien, quand bien même la finalité du mal serait de devenir substantiellement un bien. Là serait donc l’hétérodoxie et le naturalisme de la théorie de la réversibilité de Maistre : le principe de réversibilité ne serait, plus largement, que ce phénomène cosmique de permutabilité substantielle du mal en bien dont le sacrifice, par son caractère sanglant intrinsèque, et donc purgatif, serait le medium privilégié :

 

La terre entière, continuellement imbibée de sang, n’est qu’un autel immense où tout ce qui vit doit être immolé sans fin, sans mesure, sans relâche, jusqu’à la consommation des choses, jusqu’à l’extinction du mal, jusqu’à la mort de la mort.[73]

 

            Ce « secret naturalisme[74] » de la pensée maistrienne n’a pas manqué d’être relevé par la théologie la plus officielle,  lui reprochant essentiellement et fondamentalement le fait qu’elle se veut « [e]xpliquer le surnaturel par la nature[75] », faisant ainsi à bien des égards une « confusion » entre le « naturel et [le] surnaturel[76] ». Cette confusion est en outre essentielle en ce que par elle le paradoxe de fond du système de la pensée maistrienne – si tant est que l’on puisse parler de pensée systématique – est révélé : la pensée maistrienne est en cela ambivalente qu’elle n’est pas sans constituer un certain « matérialisme mystique[77] ».

 

            Le travail théologique critique le plus vaste sur ce sujet est encore celui du cardinal de Lubac dans sa Postérité spirituelle de Joachim de Flore. Celui-ci, dans la perspective de son essai, rattache en effet le « glissement naturaliste » de la pensée maistrienne à son millénarisme ; Maistre, partisan de la vision mystique d’un découpage de l’Histoire en trois âges mystiques correspondant aux trois hypostases divines, attend ainsi l’avènement de l’Esprit-Saint, qui inaugurerait le troisième et dernier âge historique, le temps de « l’intelligence » selon la croyance joachimite, ce que Maistre conçoit comme une « révélation de la révélation[78] » : « Il arrivera des choses extraordinaires, qu’il est impossible d’apercevoir distinctement[79]. » Deux questions s’imposent face à ces considérations.           Premièrement, en quoi consiste cette venue de l’Esprit-Saint ? Est-ce à dire que celui-ci, promis par le Christ[80], n’est pas encore advenu, et que donc, la grâce originelle, perdue par le péché originel et retrouvée par le sacrifice du Christ, n’est pas encore justement revenue dans le monde ? De là, donc, proviendrait éventuellement l’absence de la considération de la grâce dans la pensée maistrienne, à la base de sa confusion entre naturel et surnaturel. Nous y reviendrons.

            Secondement, quelle sera la nature de ce changement à venir, de ce pressentiment d’une « évolution extraordinaire dans le catholicisme[81] » ? Comme le souligne le cardinal de Lubac, là est toujours la « même ambiguïté » : « ce troisième âge est-il du temps ? est-il de l’éternité[82] ? » – plus fondamentalement, est-ce un progrès de l’ordre naturel ou purement spirituel ?  Cette « révélation de la révélation » engage la perspective traditionnaliste de Maistre, sa conception de la « religion universelle » telle que nous avons pu déjà l’évoquer et qui se fonde sur « sa vision cosmologique très large (rapprochements entre les religions païennes et le christianisme, quant aux croyances, aux rites)[83] ». En effet, si pour Maistre le catholicisme, principe évolutif, est cette « religion universelle qui se cherche encore » jusqu’à son aboutissement comme « vrai et plein catholicisme[84] » et qui consacre tous les « dogmes » de la religion naturelle, c’est cependant dans ce souci de conciliation traditionnelle dans une perspective évolutive de la Révélation que survient la portée naturaliste de la pensée maistrienne. Comme le souligne Lubac, cette « révélation de la révélation » semble à bien des égards n’être que de l’ordre d’un progrès purement matériel, car moral et social :

 

Peut-être, en particulier, le catholicisme qu’il entrevoyait, cette « religion universelle », restait-elle assez proche parente de la « religion naturelle » dont le concept avait étrangement évolué, depuis les théologiens décrivant la religion antérieure à la loi, en passant par les déistes italiens et anglais pour aboutir aux « lumières » des Français, puis à l’idéal projeté dans l’avenir par Lessing[85]. 

 

            En outre, rien d’étonnant donc que survienne dès lors « une analogie trop directe » entre « ses idées sur le développement du christianisme » mêmes et « sa philosophie politique », analogie qui « en compromet la transcendance et tend à en faire seulement la plus grande des choses humaines[86] ». Le trop grand intérêt que porte Maistre pour le caractère naturel de la religion ne semble dès lors que la limiter à sa finalité et son utilité naturelle, à sa pure fonction anthropologique et politique – « point de vue politique auquel il était, par nature et par fonction, particulièrement sensible et qui domine trop habituellement dans ses conceptions religieuses[87] ». C’est d’ailleurs ce qu’a pu aussi relever Urs von Balthasar[88], à propos de la conception maistrienne de l’« unité sociologique » de l’Église, de son « importance excessive accordée [...] à la structure de l’Église catholique comme telle » au risque de la réduire qu’à n’être qu’un corps naturel là où elle est le corps mystique du Christ.

 

            Le « secret naturalisme » de la pensée maistrienne repose ainsi sur la primauté accordée au naturel sur le surnaturel, leur confusion. Le surnaturel, si, certes, « ne détruit pas le naturel, [...] pren[ant] même appui sur lui », lui donne toutefois « un sens nouveau, une efficacité tout autre » il le « perfectionne[89] ». Chez Maistre, au contraire, la Révélation ne fait que trop se conformer à l’ordre naturel, l’ordre révélé s’y superposant jusqu'à s’y confondre ; Maistre ne dit-il pas lui-même que « les dogmes ne sont que des lois du monde divinisées, des notions innées et déposées dans les traditions de tous les temps[90] » ? En fait, si « Maistre ne discerne pas assez les vérités religieuses connues par l'homme par voie naturelle, de celle qui lui proviennent d'une révélation surnaturelle[91] », c’est donc cette notion de perfectionnement de l’ordre naturel par la Révélation et la par la grâce qui n’est que trop atténuée dans sa pensée.

            Comme le souligne Jean-Louis Soltner, c’est justement dans « la théorie de Maistre sur la guerre et sur les sacrifices, que l’on saisira le mieux la relative confusion entre le naturel et le surnaturel[92] » de la pensée Maistrienne – sa théorie de la guerre et du sacrifice reposant sur le même principe de réversibilité, sur un même principe sacrificateur[93]. Là encore, Maistre ne fait que conformer la Révélation opérée par le sacrifice même du Christ avec le principe sacrificiel naturel, inhérent au principe sacré de la religion naturelle, conçu par Maistre comme un « dogme » : en l’occurrence, « [l]e christianisme est venu consacrer ce dogme », et « il repose tout entier sur ce même dogme agrandi[94] ». Pour Maistre, donc, le sacrifice du Christ viendrait légitimer ce principe sacrificiel ; s’il lui donne certes un sens nouveau, établissant ce qu’il nomme la « loi d’amour », introduisant comme facteurs le libre arbitre et la charité et mettant en lumière la portée morale de l’acte commis, sa légitimation se fait par l’interprétation mystique qu’en fait Maistre : pour lui, la Croix, loin d’abolir le principe sacrificiel, vient l’élargir à des dimensions  cosmiques, le globe devenant cet « autel immense où tout ce qui vit doit être immolé sans fin[95] ». En réalité, Maistre fait ici preuve plus que jamais d’une certaine confusion entre l’utilité et la valeur naturelle du principe sacrificiel, sa fonction purement anthropologique – le sacrifice étant le socle de l’autorité et constituant l’unité communautaire autour d’un principe faussement transcendant et holistique – et sa valeur métaphysique et son sens véritables, tels que révélés par la Croix. La sévère condamnation de cette « fatale théorie de la réversibilité et du salut par le sang[96] » par Vigny dans Stello, au travers de son Docteur-Noir, est dans ce sens pertinente à bien des égards. Vigny dresse en effet un parallèle entre la « fatale idée[97] » de Maistre, pourtant « implacable adversaire de la Révolution[98] » et les échafauds de la Terreur, la théorie maistrienne venant ainsi presque légitimer les exactions de la Terreur, du moins rencontrer sa mystique sacrificielle même[99].

 

            Jean-Louis Soltner met dès lors en évidence les limites de la théorie maistrienne de la réversibilité :

 

s’il est exact que la réversibilité des mérités est possible grâce à la communion des saints (dogme de foi), il ne faut pas en oublier les conditions. La souffrance humaine n’a pas de soi valeur surnaturelle. Le sang versé n’est pas de soi sacrifice réparateur. Il ne peut acquérir cette valeur surnaturelle que par l’offrande qu’en fait l’homme à Dieu. La théologie nous dit que notre souffrance doit être unie à la souffrance du Christ, pour être agréable à Dieu et participer à l’efficacité rédemptrice de la Passion. Or, les souffrances et la mort du Christ n’ont été sacrifice plénier (...) qu’en raison de la disposition intérieure de Celui qui les a subies et offertes. C’est l’amour de son Père, qui anime le Christ et qui fait de sa Passion un sacrifice efficace. (...) L’homme y participe, dans la mesure où il fait siens les sentiments du Christ. Les monceaux de cadavres qui ont marqué les champs de bataille, les innombrables massacres d’innocents perpétrés depuis des millénaires n’ont pas par eux-mêmes de valeur réversible sur d’autres humains[100].

 

            Là est peut-être en effet le cœur de l’erreur de Maistre : sa théorie de la réversibilité ne serait qu’un dévoiement – une naturalisation – du dogme de la communion des saints. En outre, est mis ici pleinement en exergue le grand absent de sa pensée, dont la considération seule peut donner tout à la fois le sens chrétien véritable du sacrifice et établir une juste relation entre naturel et surnaturel, nature et grâce : l’Esprit Saint, par qui s’opère le phénomène mystique de réversibilité. Par cette absence notable de la considération de l’action de l’Esprit – que pourrait justifier, peut-être, son millénarisme – la pensée de Maistre, passe outre à la fois la valeur surnaturelle véritable du sacrifice et le sens véritable du surnaturel. En effet, et c’est dans ce sens que le naturalisme maistrien est le plus visible quant à l’hétérodoxie de sa théorie de la réversibilité, le sacrifice du Christ révèle la relation véritable entre nature et surnature de par l’opération mystique qui s’y opère.

 



[1] Cité in Pierre Glaudes, « Révolution française », in Dictionnaire Joseph de Maistre, in Œuvres, Paris, Robert Laffont (coll. Bouquins), éd. Pierre Glaudes, 2007, p. 1269.

[2] Bernard de Vaulx, Introduction à Joseph de Maistre, une politique expérimentale, Paris, Arthème Fayard, 1940, p. 30.

[3] Les Prophètes du Passé, Paris, Louis Hervé, 1851, p. 19.

[4] Pour lequel d’ailleurs l’œuvre de Maistre constituait une importante influence : cf. René Guénon, « Un projet de Joseph de Maistre pour l'union des peuples », in Études sur la Franc-Maçonnerie et le Compagnonnage, t. 1, Paris, Editions Traditionnelles, 1971, p. 19-30.

[5] Jean Tourniac, Melkitsedeq ou la tradition primordiale, Paris, Dervy, coll. "Dervy poche", 2010, p. 23.

[6] Ibid., p. 19.

[7] Jean-Marc Vivenza, Le Dictionnaire de René Guénon, Grenoble, Le Mercure Dauphinois, 1998, p. 494.

[8] Joseph de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, in Œuvres, op. cit., p. 766.

[9] Id., Éclaircissement sur les sacrifices, in ibid., p. 814.

[10] Ibid., p. 805.

[11] Pierre Glaudes : « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », in Révolutions au XIXe siècle: violence et identité, éds. François     Marotin et Centre de recherches sur les littératures et la sociopoétique, Clermont-Ferrand, Presses  Universitaires   Blaise   Pascal,    coll.    « Révolutions  et  romantismes »,  2011, p. 89.

[12] Joseph de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 471.

[13] Ibid.

[14] Ibid.

[15] François-André Isambert, « Religion et développement de la France du xixe siècle », in Archives de sociologie des religions, 15, pp. 63-70 – cité in Pierre Glaudes, « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit., p. 97.

[16] Pierre Glaudes, « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit. p. 88.

[17] Jean-Yves Pranchère, « Tradition », in Dictionnaire Joseph de Maistre, in Œuvres, op. cit., p. 1302.

[18] Joseph de Maistre, Notes du Cinquième Entretien, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 596.

[19] Id., Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 806.

[20] Sur la notion d’Église ultime dépositaire de la Révélation du Christ, tenancière de la Tradition véritable de par l’Infaibillité pontificale cf. Essai sur le principe générateur, in Œuvres, op. cit., pp. 363-402. Ce dernier essai, notons-le, n’a pas sans avoir influencé la pensée de saint John-Henry Newman, théologien moderne de la Tradition catholique, comme celui-ci le reconnait lui-même dans l’exergue de son Essay On Development Of Christian Doctrine (1845).

[21] Joseph de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 734.

[22] Joseph de Maistre, Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 806.

[23] Ibid., p. 814.

[24] Les Prophètes du Passé, op. cit., p. 34.

[25] Joseph de Maistre, Considérations sur la France, op. cit., p. 224.

[26] Id., Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 808.

[27] Ibid., p. 812.

[28] Ibid., p. 811.

[29] Ibid., p. 812.

[30] Ibid. pp. 825 – 826.

[31] Pierre Glaudes : « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit., p. 90.

[32]  Joseph de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., pp. 728-729.

[33] Id., Lettre du 16 (28) janvier 1815 au comte de Bray, in Œuvres complètes, xiii, Lyon, Vitte et Perrussel, 1886, p. 28.

[34] Id., Eclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 815.

[35] Pierre Glaudes : « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit., p. 92.

[36] Baudelaire, Mon cœur mis à nu, feuillet 21 [Fusées. Mon cœur mis à nu. Et autres fragments posthumes, op. cit., p. 89].

[37] Joseph de Maistre, Eclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 813.

[38] Marc Froidefont, « La Réversibilité », in op. cit., p. 393.

[39] Owen Bradley, « La théorie maistrienne du sacrifice », in Joseph de Maistre, Philippe Barthelet dir., Lausanne, L’Âge d’homme, coll. « Les Dossiers H », 2005, p. 612.

[40] Pierre Glaudes : « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit., p. 91.

[41] Ibid., p. 97.

[42] Joseph de Maistre, Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 816.

[43] Ibid., p. 815.

[44] Ibid.

[45] Marc Froidefont, « La Réversibilité », in op. cit., p. 396.

[46] Joseph de Maistre, Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 833.

[47] Id., Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 711.

[48] Jn 10 : 18.

[49] Ro 5 : 18-19.

[50] Col 1 : 20.

[51] Joseph de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 484.

[52] « Si, chaque fois que son sang est répandu, il est répandu pour la rémission des péchés, je dois toujours le recevoir pour que toujours il me remette mes péchés. Moi qui pèche toujours, je dois toujours avoir un remède. » (Saint Ambroise, De sacramentis, iv, 8 – cité et traduit in Charles Journet, « Présence réelle du Christ sacramenté », in Le Mystère de l’Eucharistie, Paris, Pierre Téqui, 2018, p. 12.)

[53] Charles Journet, « L’Eucharistie, sacrement et sacrifice du Christ », in Le Mystère de l’EucharisteParis, Pierre Téqui, 2018, p. 32.

[54] Joseph de Maistre, Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 838.

[55] Ibid., p. 833.

[56] Id., Considérations sur la France, op. cit., p. 218.

[57] Id., Eclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 834.

[58] Pierre Glaudes, « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit., p. 94.

[59] Joseph de Maistre, Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 834.

[60] Charles Journet, « Présence réelle du Christ sacramenté », in Le Mystère de l’Eucharisteop. cit., p. 12.

[61] « L’Eucharistie n’est pas seulement sacrement mais encore sacrifice extérieur étant le signe du sacrifice intérieur par lequel on s’offre soi-même. » (Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, iii, qu. 82, a. 4 – cité et traduit in Charles Journet, « L’Eucharistie, sacrement et sacrifice du Christ », op. cit., p. 44.)

[62] Charles Journet, « L’Eucharistie, sacrement et sacrifice du Christ », op. cit., p. 57.

[63] Joseph de Maistre, Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., p. 837.

[64] Id., Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 693.

[65] Id., Éclaircissement sur les sacrifices, op. cit., pp. 825-826.

[66] Arlette Michel, « Sacré et sacrifice dans la pensée de Joseph de Maistre », in Bulletin de l'association Guillaume Budé, 2, juin 1989, p. 194.

[67] Pierre Glaudes, « Sacrifice », in Dictionnaire Joseph de Maistre, op. cit., p. 1277.

[68] Id., « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit., p. 95.

[69] Ce que souligne d’ailleurs très justement Marc Froidefont (« La Réversibilité », op. cit., p. 393).

[70] Joseph de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., pp. 751-752.

[71] Pierre Glaudes, « Une idée antimoderne : la réversibilité », art. cit., p. 38.

[72] Id., « Identité chrétienne et sacrifice. Joseph de Maistre face à la violence révolutionnaire », art. cit., p. 97.

[73] Joseph de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 661.

[74] Henri de Lubac, La Postérité spirituelle de Joachim de Flore, i, Paris, Lethielleux, coll. « Le Sycomore », 1979, p. 299.

[75] Louis Binaut, « Joseph de Maistre et Lamennais », La Revue des Deux Mondes, vol. 31, n° 3, 1er février 1861, p. 562.

[76] Jean-Louis Soltner, « Le Christianisme de Joseph de Maistre », in Joseph de Maistre, op. cit., p. 481.

[77] Il s’agit du sous-titre de l’ouvrage de Robert Triomphe, Joseph de Maistre. Étude sur la vie et sur la doctrine d'un matérialiste mystique Genève, Droz, 1968, 630 p.

[78] Cité in Henri de Lubac, loc. cit., p. 303.

[79] Joseph de Maistre, lettre du 4 décembre 1820 au vicomte de Bonald – cité in Henri de Lubac, loc. cit., p. 299.

[80] Jn 14 : 26

[81] Louis Binaut, « Joseph de Maistre et Lamennais », art. cit., p. 571.

[82] Henri de Lubac, loc. cit., p. 292.

[83] Jean-Louis Soltner, loc. cit, p. 486.

[84] Henri de Lubac, loc. cit., p. 307.

[85] Ibid., pp. 307-308.

[86] Ibid., pp. 298-299.

[87] Ibid., p. 297.

[88] Hans Urs von Balthasar, Le complexe antiromain : essai sur les structures ecclésiales, trad. Willibrorda o.s.b, Paris, Apostolat des éditions, 1976, pp. 108-109.

[89] Jean-Louis Soltner, loc. cit, p. 487.

[90] Joseph de Maistre, Du Pape – cité in Gérard Delaplace, « La tradition, principe d’une politique dans la pensée de Joseph de Maistre », in Joseph de Maistre, op. cit., p. 427.

[91] Jean-Louis Soltner, loc. cit, p. 480.

[92] Ibid., p. 487.

[93] Pour Maistre, en effet, comme il le dit dans ses Considérations sur la France, « Dieu a fait ce monde pour la guerre » : « la guerre est l’état habituel du genre humain » en ce que, comme un principe sacrificiel élargi à l’échelle des nations et des peuples, « le sang humain doit couler sans interruption sur le globe », la Providence châtiant les coupables et sanctifiant les innocents, rétablissant, par loi de réversibilité, l’ordre naturel comme mystique, « purifi[ant] » (in Œuvres, op. cit., p. 213, 218).

[94] Joseph de Maistre,  Considérations sur la France, op. cit., p. 218.

[95] Id., Les Soirées de Saint-Pétersbourg, op. cit., p. 661.

[96] Alfred de Vigny, Stello, chap. xxxii, in Œuvres Complètes, ii, Alphonse Bouvet éd., Paris, Gallimard, coll. « La Pléiade », 1993, p. 617.

[97] Ibid., p. 616.

[98] Ibid., p. 614.

[99] « Et prévoyait-il, le prophète orthodoxe, que de son temps même croîtrait et se multiplierait, à l’infini, la monstrueuse famille de ses Sophismes, et que parmi les petits de cette tigresse race, il s’en trouverait dont le cri serait celui-ci :

"Si la substitution des souffrances expiatoires est juste, ce n’est pas assez, pour le salut des peuples, des substitutions et des dévouements volontaires et très rares. L’innocent immolé pour le coupable sauve sa nation ; donc il est juste et bon qu’il soit immolé par elle et pour elle ; et lorsque cela fut, cela fut bien. "

Entendez-vous le cri de la bête carnassière, sous la voix de l’homme ? — Voyez-vous par quelles courbes, partis de deux points opposés, ces purs idéologues sont arrivés d’en bas et d’en haut à un même point où ils se touchent, à l’échafaud ? » (ibid., p. 617)

[100] Jean-Louis Soltner, loc. cit, p. 487.

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